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L’orientation professionnelle, un impératif pour maximiser les formations

Murielle Antille, directrice monde des affaires publiques de LHH,

Entretien avec Murielle Antille, directrice monde des affaires publiques de LHH, qui a publié une étude en 2021 sur le rôle de l'orientation et du coaching professionnel pour les adultes dans un contexte d'apprentissage tout au long de la vie.

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Peux-tu te présenter et expliquer ce que tu fais chez LHH?

LHH a pour vocation d'accompagner les individus et les organisations dans leurs transformations et transitions. Concrètement, nous accompagnons des restructurations et des processus de digitalisation, en mettant les personnes au centre de nos démarches, que ce soit pour la prise de nouveaux postes, le développement de leadership, mais aussi le recrutement de talents.

Dans ce cadre-là, j'ai la responsabilité des affaires publiques et cela consiste en deux choses: d'une part, mon rôle est d’intégrer les développements externes (économiques, politiques et règlementaires) dans nos activités. Par exemple, comprendre l'impact de l'inflation sur nos clients, l’impact de la digitalisation, ou bien l’impact des changements politiques - ce qui se passe en France en ce moment aura forcément un impact sur les réformes futures.

D'autre part, mon rôle est de présenter et promouvoir nos activités au sein de l’écosystème privé et public, et de collaborer avec les institutions publiques pour faire avancer le dialogue en apportant une perspective très pratique du marché. En effet, LHH accompagne près de 500,000 personnes en transition par an, et l’un de nos grands sujets est l'orientation et le coaching de carrière. Il est important pour nous de contribuer à un cadre qui permette non seulement l'optimisation de l’utilisation des moyens publics, mais aussi de rendre ces transitions plus durables: il ne s’agit pas juste de retrouver un nouveau travail, mais vraiment de rendre les transitions plus durables pour les individus.

Tu parles de l'orientation professionnelle comme un impératif. Pourquoi ?

Dans le contexte actuel de transformation, on parle souvent des déclencheurs en 3 D: la digitalisation, la décarbonisation, et la démographie. Et moi, j'aime bien parler des 4 D, parce qu'il y a en plus, selon moi, la notion de désorientation. En effet, on se rend compte que les carrières sont de moins en moins linéaires et on a beaucoup plus de transitions. J'ai vu dernièrement des chiffres aux Etats-Unis qui parlaient d’une moyenne de 12 activités professionnelles différentes au cours d’un même parcours. C’est énorme! De fait, nous observons de plus en plus de transitions parmi les individus que nous accompagnons, qui nous disent que ce n'est pas la première fois qu'ils perdent leur poste ou qu'ils ont accès à la transition de carrière. Certes, on a une montée en compétence sur l’orientation professionnelle, mais en même temps, les possibilités sont plus larges que jamais dans un monde en totale évolution.


LHH a fait une étude en 2021 sur le rôle de l'orientation et du coaching professionnel pour les adultes dans un contexte d'apprentissage tout au long de la vie. Nous avons enquêté auprès d'individus sur leur utilisation de fonds publics destinés à la formation, qui existent en France avec le CPF, mais aussi à Singapour. Nous souhaitions comprendre quel est le lien entre cet accompagnement et un succès quelconque, dans la formation ou au-delà. Nos résultats indiquent que non seulement le coaching et l'orientation professionnels ont un impact direct sur la prise de conscience des individus sur leur besoin de formation, mais aussi sur leur facilité à naviguer l'offre de formation. Les personnes qui reçoivent du coaching professionnel obtiennent de meilleurs salaires ou de meilleurs postes, suite à leur formation.

Si l’on ne retient que 2 chiffres: les personnes ayant un accès à un coaching sont 3 fois plus enclines à accéder aux subventions proposées, et donc à s’engager dans une formation, et 6 fois plus à obtenir des résultats suite à leur formation. Donc oui, l'orientation et le coaching sont vraiment un impératif afin de réduire la désorientation et de favoriser des transitions durables.

Tu as un rôle global qui permet d'observer les meilleures pratiques autour de l'emploi dans le monde. Que peut-on apprendre de nos voisins ?

J’ai récemment participé au Forum Local de l'OCDE, dont le but est vraiment d'échanger sur les pratiques locales et il y avait beaucoup d'opportunités d'inspirations, même si souvent le local et la culture conditionnent le succès de telle ou telle approche. Je mentionnerais trois éléments.

D'une part, les investissements dans la formation. On voit que beaucoup de pays investissent, que ce soit au niveau de l'Union européenne qui a mis en place le "Pact for skills", ou en Angleterre et aux Etats-Unis, mais peu de pays connectent vraiment directement le financement des formations et ce qu'il y a autour. Un exemple se démarque: l’Allemagne finance des formations alors que les personnes sont en chômage partiel. Ils ont aussi considérablement élargi les critères de participation des entreprises pour être éligible aux subventions. Donc on a de plus en plus de possibilités d'accéder à ces formations pour les personnes en emploi, au-delà du soutien aux seuls demandeurs d’emploi. Les autres exemples sont la France et Singapour qui offrent cette allocation annuelle (le compte personnel de formation) qui sont des références à l’échelle internationale, car il y a peu de pays encore qui en ont fait des copies. Mais selon moi, ce qui est important, c'est de penser la formation indépendamment d'un poste ou d'un employeur spécifique. Je suis assez fan des modèles de cotisation sociale, qui soient portables, et restent à la disposition de l’individu, indépendamment de sa forme d’emploi. Et ça, c'est vraiment quelque chose qui pourrait être bien plus développé.

D’autre part, les transitions de carrière. J'aime bien l'exemple de la Hollande qui a réussi à établir un lien entre la responsabilité de l'entreprise à soutenir les employés lors d’un plan social et leurs besoins à être soutenus dans cette transition. Là, les entreprises ont la possibilité de déduire certains coûts de formation et de reclassement des indemnités de départ. Ainsi, on va au-delà d'un soutien financier, un soutien financier qui n'est pas en soi durable, qui est un soutien direct et à court terme. Avec cette approche, on promeut le support durable aux personnes sans coût additionnel pour l'entreprise, je trouve que c'est très intéressant.

Et enfin, l'orientation professionnelle. Les Flandres en Belgique la connaît mais aussi la Suisse a introduit récemment la possibilité pour tout adulte de plus de 40 ans d'obtenir un soutien à l'orientation professionnelle. Comparé à la Suisse, je trouve que les Flandres l'intègrent un petit peu mieux au monde du travail direct, car on observe que les personnes s’engagent plus facilement si elles voient un bénéfice dans leur emploi actuel. Mais dans les deux cas, ces offres sont facilement proposées par les services publics, ce qui permet d’obtenir du soutien si on ne l'obtient pas de l'entreprise.

Que peuvent faire les employeurs pour mieux accompagner leurs collègues collaborateurs dans leur transition de carrière ?

Chez LHH, comme tu peux l'imaginer, on voit beaucoup de choses. Mais les entreprises qui montrent de bons résultats ont 3 caractéristiques.
D'une part, elles ont introduit une culture de mobilité. L'important, c'est de ne pas attendre le besoin direct de mobilité pour faciliter la transition. C'est vraiment de poser un cadre d'évolution et d'agilité pour que ça devienne naturel et accessible à tous, pas uniquement pour les cadres ou les mobilités internationales.

La deuxième caractéristique, et je pense que c'est presque une condition à la première, c'est d’équiper les managers. Loin de moi l'idée de leur jeter la pierre, mais ils sont généralement le frein numéro un à la mobilité, en ayant tendance trop souvent à vouloir garder leurs meilleurs talents. De plus, ils se sentent souvent mal à l'aise avec le coaching de carrière, en voulant donner toutes les clés pour la mobilité, alors que c'est souvent complexe. Une mobilité au sein d'une entreprise, c'est toujours une situation personnelle et spécifique. Donc, il s'agit beaucoup plus de savoir poser les bonnes questions à l’employé plutôt que de donner les réponses – et ceci est presque déjà la définition du coaching !

Et la troisième caractéristique, c'est de faciliter l'orientation. Il faut équiper les managers mais aussi les employés pour que chacun soit acteur de son propre chemin professionnel. Et là, il ne faut pas confondre orientation et coaching. Parce que finalement l'orientation, c’est montrer l’horizon des possibles et suggérer des réponses, alors que le coaching, c’est plutôt partir de la personne, et l’amener à réfléchir sur des questions (telles que: “qu’est-ce que tu aimes? quelles sont tes aspirations? tes motivations? etc”) et transférer la responsabilité sur elle, tout en lui fixant un cap sans la laisser seule.

Quels conseils donnerais-tu aux personnes qui cherchent à bâtir ou maintenir leur employabilité ?

Chaque personne est différente, donc ce serait très réducteur de proposer un conseil général. Mais je pense que c'est vraiment impératif de devenir son propre architecte de carrière, et ce n'est pas quelque chose de simple! Même pour moi qui suis du métier et qui en parle tous les jours, je me rends compte que c'est du travail et qu’il faut le prendre comme un projet à part entière.
Chez LHH, nous utilisons un modèle des 5 P, qui peut être utile aux lecteurs de Go Fenix:

  • P de Personne. En partant de soi: “Qu'est ce que j'aime ? Qu'est ce qui me motive ? Qu'est ce que j'ai déjà ? Quels types de compétences j'ai déjà ?” Il faut vraiment se poser ces questions, car personne ne peut y répondre pour nous.
  • P de Performance. “Quelle est ma réputation aujourd'hui dans le monde du travail, en particulier dans mon entreprise ? Pourquoi est-ce que je suis là ? Et pour quoi suis-je reconnu?”
  • P de Place (à savoir “endroit”, c’est un modèle anglophone!). Il s’agit de rester ouvert aux tendances du marché, et de comprendre dans quelle direction ça évolue pour pouvoir se positionner dans le cadre de ces tendances, et ne pas rester dans un domaine qui pourrait devenir obsolète.
  • P de Possibilités. Quelles sont les options, l'alignement avec l'organisation, les objectifs qu'on a soi même? Quel genre de travail est vraiment utile au sein de l'organisation pour pouvoir évoluer? C'est toujours plus facile d'évoluer dans une organisation qui est déjà là plutôt que d'aller vers l'extérieur.
  • P de Plan. Ce n'est pas simple d'être architecte de son propre chemin, mais il faut avoir un plan et surtout regarder quelles sont les structures de support, notamment les ressources humaines. Mais aller au-delà d'une structure, c'est aussi de s’entourer d’un mentor, de personnes qui sont mobiles, qui pourraient être de bons exemples, ou même d'aller chercher les services d'un coach si c'est pas quelque chose qui est proposé dans l'entreprise.


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